Décidément, l’esprit européen est bien mal en point. Ces jours-ci, c’est notre président bien-aimé, François Hollande, grand européen devant l’éternel, qui se permet de lui planter un couteau dans le dos.
La chose est peut-être passé inaperçue. A l’occasion d’un déplacement en province, le président a commenté la crise de l’élevage français. Il a souligné à cette occasion l’importance des labels « viande française » qui permettent de distinguer les produits issus des élevages français, et a fini par un vibrant pladoyer pour appeler ses concitoyens à acheter de préference de la viande française, même s’il faut payer un peu plus cher.
Alors là, je ne comprends plus rien. Nous avions « fait l’Europe » pour permettre au contraire une concurrence « libre et non faussée » entre les pays européens. Cette concurrence devait se traduire pour le consommateur par de meilleurs prix, et pour les éleveurs par la possibilité de vendre leurs produits dans un marché de « 400 millions de consommateurs ». Et voilà que notre président, un « européen de cœur », nous propose rien de moins qu’un protectionnisme de fait, assuré par le biais d’une étiquette et de la discipline du consommateur ? Après tout, si l’on est véritablement européen, pourquoi acheter du porc français plutôt que du porc allemand, tout aussi bon et moins cher ? Et si l’on est un véritable européen, à quoi rime cet appel à créer des barrières en achetant plus cher en fonction de la provenance ?
Au détour d’une conversation, on voit encore une fois combien l’Europe est une fiction. Non, pour nos hommes politiques, aussi « européens » soient-ils, un éleveur français ne vaut pas un éleveur allemand, polonais ou roumain. Si demain les consommateurs français se mettaient à acheter de la viande française, mettant de ce fait en faillite des éleveurs allemands, polonais ou roumains, mais sauvant des exploitations françaises, ces « européens » seraient les plus heureux des hommes. Et lorsque les consommateurs font le choix qu’on attend d’eux en achetant le moins cher, ils viennent leur expliquer qu’ils ont tort.
Les mêmes qui vomissent tout protectionnisme normatif appellent à un protectionnisme « populaire ». Ils nous expliquent que mettre des barrières aux frontières serait catastrophique, mais appellent les consommateurs français à éviter les produits importés. Vous avez dit « incohérence » ? Qu'attendent nos courageux "européens" pour aller expliquer aux éleveurs français qu'il faut "penser européen" et se réjouir du succès de l'élevage dans cette province européenne que s'appelle "Allemagne" ?
Descartes
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